Je suis particulièrement heureux d’ouvrir les travaux de cet important colloque consacré à la mise à niveau des métiers de l’éducation, de la formation, de la gestion et de la recherche.
Je voudrais en premier lieu remercier messieurs les ministres pour leur présence et leur participation à cette rencontre et pour le soutien qu’ils ont apporté à notre Conseil dans la préparation de ce colloque.
Je voudrais aussi accueillir et remercier chaleureusement les experts nationaux et étrangers dont certains ont fait un long voyage pour être parmi nous aujourd’hui.
Mes remerciements vont également aux intervenants, aux présidents de séances et aux rapporteurs qui ont bien voulu apporter leur précieuse contribution à la qualité et au bon déroulement de cette rencontre ainsi qu’aux membres du comité scientifique et d’organisation de ce colloque. Je voudrais aussi remercier l’UNICEF et le British Council pour leur intérêt et leur soutien.
Mesdames et Messieurs,
Nous savons tous que notre système éducatif souffre de maux multiples et profonds qui lui ont valu la place, peu honorable, que vous connaissez dans les classements internationaux. Rappelons que les déficiences en matière d’équité et d’égalité des chances perdurent, que les taux de décrochage et de déperdition restent terrifiants, que le niveau de qualité ne produit pas des têtes bien faites et n’assure pas suffisamment l’insertion des jeunes dans la vie sociale.
Pour renverser la vapeur, il fallait rompre avec le pessimisme de la raison et tout miser sur l’optimisme de la volonté. Et c’est ce que nous avons fait collectivement avec la vision stratégique de la réforme (2015-2030) qui répertorie vingt-trois leviers à actionner et place la réhabilitation et la mise à niveau des métiers de l’éducation en tête des leviers les plus décisifs. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement compte tenu de la centralité des acteurs éducatifs dans tout processus de changement et eu égard à leur rôle décisif et incontournable dans toute entreprise d’amélioration des apprentissages et des performances.
On peut discuter à l’infini de la question de savoir dans quelle mesure et dans quelle proportion la détérioration de l’école serait le fait des acteurs éducatifs. Mais on peut affirmer avec certitude que les acteurs éducatifs sont nécessaires et indispensables à la rénovation de l’école qui passe, inéluctablement, par les acteurs éducatifs qui restent les meilleurs porteurs du changement.
Or, c’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui et c’est bien de cela que nous allons échanger et débattre durant ce colloque pour savoir comment les acteurs éducatifs peuvent et doivent apporter leur contribution décisive à la réhabilitation de l’école.
Certes, la réhabilitation de l’école constitue un chantier colossal qui exclut la précipitation et l’improvisation et qui demande du temps, de la persévérance et de la détermination. Mais nous savons que nous nous trouvons à un moment privilégié où nous disposons d’atouts inédits et sans précèdent dans notre histoire pour relever dès à présent ce grand défi.
En premier lieu parce que le temps des tâtonnements et des hésitations, des tensions et des dissensions est révolu depuis que nous disposons d’une vision claire, d’une feuille de route précise et d’une démarche consensuelle.
En second lieu parce que l’État à tous ses niveaux et la société avec toutes ses composantes ont pris le ferme engagement d’agir pour stopper la chute, d’adhérer à une dynamique de changement et de remonter la pente en suivant le chemin tracé et balisé par le CSEFRS et qui sera bientôt pérennisé dans une loi-cadre.
C’est donc dans ce contexte politique particulièrement favorable que nous travaillons et que nous nous réunissons aujourd’hui pour réfléchir, échanger et débattre d’un préalable incontournable à la réforme, d’un levier essentiel de la réforme et d’un vecteur décisif du changement à savoir la mise à niveau des métiers éducatifs.
Et c’est précisément ce contexte favorable qui détermine et définit la mission de ce colloque. Notre mission n’est pas de discourir sans cap sur un sujet passablement labouré, ni de disserter sans fin sur des vécus personnels ni d’ajouter des dissertations nouvelles à la littérature existante. Notre mission est de réfléchir ensemble aux mesures à prendre pour réussir la mise à niveau des métiers éducatifs, d’identifier les actions à entreprendre pour corriger les dysfonctionnements actuels et de déterminer les changements à réaliser pour améliorer la qualité des prestations et les performances des acteurs éducatifs. Ceci en veillant à ce que chaque acteur assume, en fonction de son statut, de ses missions, les responsabilités qui sont les siennes et à ce que tous les métiers travaillent de concert au meilleur service de la mise à niveau continue de l’école marocaine.
Et c’est en nous imposant cette discipline intellectuelle que nous parviendrons à apporter une contribution conséquente à la refondation et à la valorisation des métiers de l’éducation, de la formation, de la gestion et de la recherche.
Et c’est aussi grâce à cette discipline intellectuelle que notre colloque parviendra à faire œuvre utile en mettant les professionnels de l’éducation en situation d’apporter une contribution décisive à l’école de l’équité et de la qualité pour tous.
Nous devons être rigoureux et exigeants dans l’identification des problèmes, novateurs et ambitieux dans nos propositions. Il ne s’agit pas de bricoler des mesures de replâtrage mais d’aller au fond des choses, de procéder à des remises à plat sans concession et de faire des propositions qui ne craignent ni le changement ni la rupture.
S’agissant des métiers de l’enseignement et à titre d’exemples, il nous faut reconsidérer l’accès à la formation initiale des acteurs éducatifs en étant aussi sélectif que l’exige un métier dont dépend l’avenir du pays et qui requiert une vocation et une motivation à toute épreuve.
Il nous faut aussi repenser la formation initiale pour préparer à un métier qui exige, à côté d’un savoir éprouvé, de fortes doses de pédagogie et de tact, de méthode et de patience, de souplesse et de créativité ainsi que des aptitudes exceptionnelles à donner l’exemple.
Il nous faut également revisiter la formation continue pour aider les débutants à surmonter leurs difficultés, pour permettre aux initiés d’affronter les risques du métier et de suivre ses évolutions et pour permettre à tous, des plus jeunes aux plus anciens, d’améliorer leurs prestations et leurs performances tout le long de leur carrière.
Il nous faut enfin imaginer d’intenses dispositifs de soutien et des accompagnements soutenus pour les enseignants en difficulté afin d’assurer leur mise à niveau et d’améliorer leurs prestations.
Ce ne sont là que des exemples, je ne prétends pas entrer en matière mais simplement évoquer des pistes à discuter, à approfondir et surtout à enrichir par des propositions qui s’attachent à tous les métiers de l’éducation, dans leurs différentes dimensions.
Pour finir je voudrais avant de passer la parole au Professeur Edgar Morin lui rendre, en notre nom à tous, un hommage appuyé et saluer en lui l’éminent penseur, philosophe et sociologue qui a depuis longtemps porté une attention vigilante aux problèmes de l’éducation. Nul doute que sa conférence inaugurale donnera le ton de ce que nous pourrons espérer de mieux pour les métiers de l’éducation et pour notre système éducatif : un système humaniste et ouvert qui forme un citoyen libre et conscient de ses responsabilités envers lui-même, envers sa communauté et envers le monde c’est-à-dire ce « patriote terrien » qui lui est cher.